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La pensée « lean-agile », une boussole sécurisante pour agir dans l’incertitude.

LA PENSEE « LEAN-AGILE », UNE BOUSSOLE SECURISANTE POUR AGIR DANS L’INCERTITUDE.

Fabrice Schwalm, Consultant Digispin, propose de s’approprier les méthodes Lean-Agile comme un chemin vers l’excellence opérationnelle en période d’incertitude.

2020 restera probablement dans nos mémoires comme l’année du « Cygne Noir » (*Nassim Nicholas Taleb). Un événement hautement improbable, impensable aux yeux de tous, a fait caler les économies du monde entier. Rappelés brutalement à une posture d’humilité face à l’imprévisibilité de certaines circonstances, nous reprenons conscience de l’importance de s’équiper de boussoles pour nous guider dans l’incertitude.

La première d’entre-elle se présente sous forme d’une question : « Comment transformer de l’incertitude en événements prévisibles ? ».

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Beaucoup de managers et de chefs de projet tâtonnent depuis longtemps sur cette question, au premier abord insoluble.

Venu de l’univers IT, le référentiel SAFe a eu l’idée d’assembler une boussole opérationnelle par agrégation des meilleures pratiques connues. Son approche dynamite les codes traditionnels. Il est d’une inspiration très utile.


Cet article se propose d’explorer les dix principes qui le sous-tendent…

  1. s’organiser autour de la valeur; L’approche du client a été l’une des premières transformations profondes de la révolution digitale. Nous sommes passés de la commercialisation d’un produit/service client « fonction » à celle d’un Produit/service client « valeur ». Prolongement de ce changement de perspective, la « pensée valeur » est promise à irriguer toutes les dimensions de l’entreprise, stratégie, organisation, management, efficacité opérationnelle. La première grande injonction invite à ouvrir les silos pour leur greffer des structures transverses organisées autour des chaînes de valeur business. La réorganisation est systémique et nécessite un travail fin d’alignement stratégique.
  2. activer les leviers de motivation intrinsèque des collaborateurs; Quelque soit leur métier, leur poste, leurs responsabilités, les individus sont devenus des travailleurs du savoir émancipés, mus davantage par les moteurs de leurs désirs de développement et d’épanouissement dans le travail que par la rémunération et leur rapport à l’autorité hiérarchique. Le management par la contrainte a laissé la place au management par la mobilisation. Les salariés ressources sont à présent des collaborateurs partenaires. Le changement est culturel. Les dirigeants en sont les premiers vecteurs. Ils portent l’énorme responsabilité de créer l’environnement propre à opérer cette transmutation quasi-alchimique de la motivation en performance. Les leviers aujourd’hui abondamment discutés questionnent l’autonomie, la responsabilisation, l’intelligence collective, la qualité de vie au travail.
  3. décentraliser la prise de décision; L’inertie des circuits de prise de décision est un véritable cancer de l’efficacité. La subsidiarité en est le remède. Elle pose que la responsabilité d’une action doit être confiée en toute autonomie à l’entité ou à la personne capable la plus proche de la situation. Tout ce qui n’est pas stratégique (long terme, coût important, situation inhabituelle) peut être décentralisé. Les acteurs savent comment gérer le fréquent, l’urgent, le local. Il suffit de les y inviter et de leur faire confiance. Ce renversement de logique demande aux managers un véritable, et difficile, changement de posture de lâcher-prise.

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  1. porter un regard systémique sur les situations; « Le tout est plus que la somme des parties ». Ce grand mantra de la systémique aide à cimenter l’action collective. Quelques recommandations pratiques en découlent :
    aligner tous les acteurs/entités sur la stratégie de l’entreprise, fédérer toutes les parties prenantes sur la finalité commune de l’action engagée, inviter chacun à assujettir son intérêt personnel au bien commun, viser l’optimum global de performance des processus plutôt que des optimums locaux qui se cannibalisent. Force est de constater que dans beaucoup d’organisation, cet alignement ne va pas de soi.
  2. garder toujours un œil rivé sur la dimension économique; Au niveau opérationnel, l’arbitrage entre la valeur client délivrée, les coûts de réalisation, le coût du retard, le coût de la maîtrise du risque, les gains d’opportunités, doit faire l’objet d’un compromis optimal objectivé. Au niveau stratégique, les chaînes de valeur business, les ressources, les investissements, les grands projets, doivent être financés sur un principe d’allocation budgétaire dynamique assise sur l’effectivité de la valeur à délivrer. Aucune hésitation, aucun tremblement, à pivoter ou à abandonner les voies sans issue, ce même si ressources et argent ont déjà été dépensés (s’entêter creusera inévitablement des pertes plus abyssales encore).
  3. concevoir de façon incrémentale en boucles d’apprentissage rapides; Au cœur des méthodes agiles, cette approche du pilotage est en complète disruption des approches séquentielles classiques. Elle consiste à délivrer la valeur, non plus à échéances calendaires prédéfinies à l’avance, mais en continu, par des boucles itératives ultra-rapides d’enrichissement incrémental d’un « Minimum Viable Product ». Dès le début du projet, même dans sa version embryonnaire fonctionnellement incomplète, le produit/service est utilisable. Condition incontournable de ce processus, chaque itération est validée par un « feedback » client/utilisateur. La boucle d’apprentissage est en outre auto-renforcée par une démarche proactive d’amélioration continue. Un atelier bilan rétrospectif est réalisé à l’issue de chaque itération. 20% de Temps-Homme est réservé à des actions non directement productives de développement des personnes (cet investissement parait généreux mais se révèle avoir un effet ROI incomparable).
  4. franchir les jalons d’avancement par la démonstration factuelle d’une solution fonctionnelle; Dans la droite ligne du principe précédent, les démonstrations du produit/service au client fournissent des jalons clés d’évaluation objective de la qualité de la solution à chaque étape de son développement. Cette validation régulière alimente une prise de décision réactive : on continu, on ajuste, on pivote, on arrête. Bien plus qu’une myriade d’indicateurs de suivi d’avancement, cette acceptation client est la meilleure mesure de la justification de l’allocation des ressources consommées.
  5. cadencer le pilotage, coordonner et synchroniser les efforts des parties prenantes; L’incapacité à projeter de la certitude dès que l’horizon se fait lointain au regard de la complexité de l’action à mener place souvent les équipes dans une situation très inconfortable. Pour en sortir, la marche à suivre consiste à cadencer l’action en petits pas calendaires (en général deux à trois semaines) à l’intérieur desquels il est possible de maîtriser tous les tenants et aboutissants de la réalisation. La cadence offre le quadruple avantage de créer un espace clos de prévisibilités certaines, de donner des points de synchronisation réguliers aux équipes, d’insuffler le même tempo à toutes les parties prenantes, et de pouvoir s’affranchir de la tenue à jour chronophage, fastidieuse, toujours incomplète, de planning spaghetti.
  6. visualiser l’avancement du travail en cours, limiter l’ambition à la capacité à faire, réduire la taille des lots de travaux, fluidifier les files d’attentes; Composante « lean » des méthodes agiles, la maîtrise du flux est l’obsession du pilotage efficace. L’enchaînement des tâches à réaliser, les interactions entre acteurs, les interfaces entre processus, doivent être les plus fluides possibles. L’objectif est de réduire les files d’attentes d’accumulation de travail. Deux actions simples permettent d’atteindre cet objectif. La première est de réduire la taille des lots de travaux. Plus les lots sont petits, plus rapide est le flux, de moindre ampleur sont les impacts des aléas, et moins il y a risque d’engorgement d’un poste de travail. La seconde est de demander leur capacité à faire aux équipes elles-mêmes. Loin de la minimiser systématiquement, une équipe mature dépassera souvent les projections a priori du manager. Le respect de ces deux principes permet d’injecter beaucoup de sérénité dans les équipes. Elles ne courent plus derrière les jalons de réalisation fixés a priori (pour les rater souvent), elles ne sont plus sous la pression de la surcharge de travail, elles sont fières de délivrer en qualité.
  7. assumer l’incertitude et la variabilité, préserver les alternatives dans l’action; Le chemin de la réalisation est jalonné d’aléas, d’événements inattendus, d’incertitudes. C’est ainsi, il faut l’accepter… et faire avec. Le péché d’orgueil de beaucoup de managers et de chefs de projets est de s’épuiser à chercher à tout prévoir. Des cahiers des charges spécifiés dans les moindres détails, des choix de solutions techniques forcés trop tôt, l’illusion de vouloir faire parfait du premier coup, mènent l’action à l’échec. Une approche plus pragmatique consiste à identifier les alternatives à potentiel, à les évaluer, à les tester, en parallèle si possible, et, surtout, à différer le choix final jusqu’à être certain d’avoir trouvé la solution idoine optimale qui émergera naturellement.
    L’expérience montre que le coût de l’ajustement d’une solution initiale unique qui se révèle insatisfaisante en cours de réalisation peut se révéler exhorbitant.

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De cette brève incursion, en survol, de la pensée « lean-agile », retenons avant tout son rappel à la raison. Nous n’avons pas le super-pouvoir d’asservir les aléas à ne pas nous contrarier. L’incertitude se dissipe, chemin faisant, en procédant avec pragmatisme par petits pas incrémentaux cadencés sur des horizons court terme maîtrisables.

Elle nous exhorte à penser une performance responsable, guidée par une confiance totale dans la motivation de collaborateurs… à qui l’on donne les moyens de bien faire leur travail, à qui l’on donne les moyens de se développer, à qui l’on donne les moyens de révéler toute la richesse de leur intelligence collective. Elle nous montre le chemin de l’excellence opérationnelle, une invitation contre-intuitive à l’institutionnalisation de temps de travail non productifs consacrés à l’amélioration continue et au développement des personnes.

Convaincu !? Alors lancez-vous sans tarder ! Une boussole indique déjà une première direction : « Mes collaborateurs sont compétents, ils ont envie de bien faire. Mon travail à moi, Comment leur donner les moyens de… ? ».

Les équipes de Digispin sont là pour vous accompagner. Plus d’une centaine d’experts indépendants maîtrisent parfaitement quelques boussoles très utiles et seront ravis de mettre leur savoir-faire à votre service, pour des interventions toujours « sur-mesure ».

Fabrice Schwalm

Fabrice Schwalm

Transformer le travail des Hommes en performance collective

fabrice.schwalm@gmail.com

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